06/01/2008

iPhone : et si Steve Jobs se trompait ?


Cette réflexion peut paraître saugrenue tant le succès boursier d’Apple est époustouflant mais l’analyse de la blogosphère suscite quelques interrogations à ce sujet. Sans sombrer dans l’Applemania et la vénération de S Jobs, il faut bien reconnaitre que depuis qu’il a repris la direction de cette entreprise, celle-ci a renoué avec la croissance, les profits et surtout a reconstruit son image d’innovateur, née avec l’Apple IIc et le Macintosh. Apple a su satisfaire les nouveaux besoins apparus avec le développement Internet par des appareils à l’ergonomie plébiscitée et techniquement irréprochables. L’iPod et iTunes en sont un parfait exemple : Apple, constructeur de micro-ordinateurs, devient «disquaire» et «vendeur d’électrophones» à son plus grand bénéfice, avant même que les industriels du domaine le comprennent et réagissent.

L’iPhone suit-il la même voie ? D’un point de vue marketing indéniablement. Il suffit de constater l’engouement actuel pour le nouveau produit d’Apple. Le nombre d’abonnés français (70 000 abonnées en 1 mois depuis le lancement le 29/11) est là pour le confirmer.

En revanche, en y regardant de plus près, l’affaire n’est pas si simple.

Technologiquement, ce nouveau terminal ne représente pas la meilleure offre contrairement à l’essentiel des produits Apple. Avant même son lancement en France, de nombreux bloggeurs l’ont comparé avec d’autres smartphones du marché. Par exemple, les blogs N95 8 go vs Iphone : choisis ton camp ! ou http://aide-iphone-faq.blogspot.com/2007/12/comparer-iphone-nokia-n95-noel.html dressent un constat peu flatteur pour l’iPhone et largement à l’avantage du NokiaN95.

Commercialement, la stratégie d’Apple est discutable : en voulant imposer une commission aux opérateurs de télécom sur toutes les communications transitant par l’iPhone, S Jobs s’attaque directement à leur modèle économique. Il y a encore de très nombreuses offres avec « le portable à 1€ » couplé avec un abonnement (souvent lucratif), le coût réel du terminal étant payé via les consommations. De plus, Apple crée des situations de monopoles qui sont de moins en moins bien perçues par les consommateurs.

Tous les opérateurs de la planète, ATT en tête, se sont précipités pour capter l’effet médiatique lié à l’iPhone. Maintenant, il est bien évident que dès qu’une alternative crédible à l’iPhone apparaitra, ces opérateurs chercheront à se dégager des contraintes imposées par Apple. Or, comme nous venons de le voir, ces alternatives commencent à apparaitre : Nokia, LG, Samsung, Sony Ericsson,… sont de très grands groupes industriels dont les capacités d’innovation sont réelles et intactes et qui n’ont pas grand-chose à apprendre d’Apple en matière de téléphonie.

Cette stratégie de l’alternative a déjà commencé à se développer et à porter ses fruits : SFR, le grand perdant dans le « mariage iPhone », a habilement lancé ses forfaits Illimythics qui, couplés avec le N95 ou le Viewty, font un tabac (40 000 abonnés en deux semaines à comparer aux 70 000 iPhones en un mois). Il suffit de lire la réaction des bloggeurs à ce sujet, notamment Erin Vorak (Mon nouveau NOKIA N95 8GB - THE iPhone Killer sur http://aufondagauche.blogspot.com/2007/12/mon-nouveau-nok.... Et, l’on peut douter qu’Orange reste longtemps hors de ce mouvement avec comme seule offre celle de l’iPhone dont l’attrait va se relativiser.

Apple, qui demeure une très belle histoire industrielle, en tirera rapidement les conclusions qui s’imposent, en renonçant à ces monopoles anticoncurrentiels. Finalement, la bonne nouvelle est pour les consommateurs qui pourront acquérir ce petit bijou d’ergonomie à un coût plus abordable.

Alain Beauvieux